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5 novembre 2020 4 05 /11 /novembre /2020 17:45

 

Sur le crâne blanchi le cheveu s’épuise.

S’étiole la feuille aux arbres du jardin.

Reste sur les monts la neige du matin.

Sous l’ombre du soir sa pâleur devient grise.

 

Pas un souffle. La vie s’arrête, surprise.

L’arbre immobile écoute l’aboi d’un chien,

comme un adieu qui s’endort dans le lointain.

Dans les forêts du cœur les rêves s’enlisent.

 

Des feuilles que l’on brûle dans un fossé

dissolvent dans l’air mort leur verdeur passée.

Dans l’oubli s’éteignent les projets faillis

 

et la bûche meurt doucement sous la cendre.

Il fait plus froid soudain dans ce corps vieilli.

Le peuplier tremble en attendant décembre.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 5 novembre 2020

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2 novembre 2020 1 02 /11 /novembre /2020 18:15

 

J’ai entendu ta voix, ce bonheur du jour,

venue, magique, par les ondes du ciel.

J’ai attendu si longtemps ses courbes belles

envolées, croyais-je, oubliées pour toujours.

 

Je me promettais de te faire la cour

dans un rêve où l’espoir au désir se mêle.

Chaque jour sans toi rendait amer le miel.

J’imaginais pourtant l’éveil de l’amour.

 

Ta voix déploie vers moi une route offerte

qui guide mon cœur vers ta maison ouverte.

Tes yeux lanceront-ils la première flamme ?

 

Que dirons nos regards ? Quels jeux jouerons-nous ?

Oserais-je effleurer ta main, tes genoux ?

Ouvriras-tu ton corps pour offrir ton âme ?

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 2 novembre 2020

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2 novembre 2020 1 02 /11 /novembre /2020 18:04

 

Là-bas dans les Indes lointaines

En suivant les rives du Gange

L’éléphant cherche son cornac

Égaré dans l’ombre des bois.

Partout il fouille de sa trompe

Hormis aux trous des fourmilières.

Avec patience il cherche, il cherche,

Ne prenant repos ni repas

Tant qu’il ne trouve pas sa trace.

 

Barris donc, éléphant fidèle :

« Accours, cornac, à mon appel !

Reviens caresser ton ami !

Reviens chevaucher mon dos gris !

Inutile de te cacher !

Ton destin est au mien lié ! »

 

Pierre Thiollière, Castelnaudary, 28 octobre 2020

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14 octobre 2020 3 14 /10 /octobre /2020 14:08

 

Vieux fruitiers

branches grises

cerisiers

sans cerises

 

cognassiers

qui s’épuisent

secs poiriers

qui se brisent

 

on chérit

votre vie

malgré tout.

 

Par tendresse

on vous laisse

tous debout.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 14 octobre 2020

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14 octobre 2020 3 14 /10 /octobre /2020 14:06

 

Groseilles

cassis

emplissent

la seille.

 

La treille,

délice !

se hisse,

merveille !

 

Framboises

pavoisent

sur leurs

 

baguettes

fluettes,

bonheur !

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 14 octobre 2020

 

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14 octobre 2020 3 14 /10 /octobre /2020 10:33

 

Arbres

verts,

terre

âpre

 

diaprent

l’air,

claire

nacre.

 

Buis.

Fruits

surs.

 

Haies,

baies

mûres.

 

Pierre Thiollière, Garrigues,

14 octobre 2020

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13 octobre 2020 2 13 /10 /octobre /2020 18:18

 

Un enfant

endormi

à demi,

émouvant

 

sous le vent.

La fourmi,

son amie,

le défend.

 

Le bouleau

près de l’eau

s’est penché

 

sur le corps

relâché

qui s’endort.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 13 octobre 2020

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12 octobre 2020 1 12 /10 /octobre /2020 17:18

 

Euphorbes dont la sève empoisonne le sang,

bush épineux sans ombre, ciel brûlant

où les jeunes pasteurs guident les bœufs bossus

qui broutent les raquettes des cactus.

Sur le sable fauve du sud

sur le sable blanc

sur le sable roux

Monja Jaona se tient debout.

 

Il marche dans la poussière, sur les cailloux.

Il marche entre les baobabs

il marche vers le nord.

Au long des rizières il marche encore

et dans l’ombre des forêts il marche,

pendant des journées, des semaines, il marche

et parfois, pour reposer son corps nerveux

sous le glissement furtif des makis dans la fronde touffue

appuyé contre le tronc ami de l’acajou

Monja Jaona se tient debout.

 

Dans l’île lointaine là-bas vers le nord-ouest

l’autorité l’appelle, impérieuse.

Parmi les ouvriers affairés, par centaines

dans les champs de manioc, les buissons de café

les arbres parfumés prodigues de cabosses

et les bambous sucrés

parmi les reins broyés

et la rosée acide des fronts, des bras sous le soleil aride

parmi les compagnons à bout

Monja Jaona se tient debout.

 

Il s’enfuit. Dans la ville du nord

la ville qui sourit, bercée de palmes

couchée sur le rivage de la baie

un pasteur ouvre pour lui un Livre, un cœur.

Parmi les légendes qui revêtent

un habit sauvage aux longues franges antiques,

un habit de papier qui chante la bonté cruelle

d’un dieu unique et jaloux

Monja Jaona se tient debout.

 

Bientôt il retourne dans le sud

prêchant le dieu de justice.

Il appelle

le futur royaume des humbles.

Parmi

les paysans affamés mangeurs de cactus

les femmes aux pieds usés à la recherche de l’eau

les enfants bouviers qui savent lire

seulement les étoiles et les pistes des troupeaux

parmi les enfants qui boivent à même la boue

Monja Jaona se tient debout.

 

En prison après la grande colère

l’Île Rouge rougie par le sang des colons

et le sang des révoltés

la Grande Île noircie par la mitraille,

violée par les hommes jetés vivants sur les villages

depuis le grondement des avions,

en prison, pleurant son peuple courbé sous le joug

Monja Jaona se tient debout.

 

Lorsque vient la fausse Indépendance

quand les renards soumis emplissent leur panse

avec les restes, les os jetés par les maîtres

quand le pays des rizières et des bœufs

est gouverné par le bavardage des traitres,

à la verroterie il n’offre pas son cou.

Monja Jaona se tient debout.

 

Parmi

les charognes des bœufs malades

et les rapaces collecteurs d’impôt

parmi

les sagaies de la colère, la rage prolétaire

et les fusils des gendarmes

parmi les cadavres laissés à la dent des chiens,

en prison parmi son peuple tenu en joue

Monja Jaona se tient debout.

 

Lorsque les villes à leur tour se soulèvent

les élèves, les jeunes chômeurs

déferlent, foule vive, dans les rues, sur les places

de Tananarive,

lorsque la liberté à nouveau enfle les cœurs

et que les légions étrangères reprennent la mer

le vieux lutteur à nouveau délivré des chaînes

appelle à l’unité le peuple des petits.

Au milieu des humbles qui s’éveillent

et qui veulent le pouvoir sur le poisson et sur le riz,

sur la parole, sur l’école, sur la fraternité,

dans la rumeur d’un grand pays que des volcans secouent

Monja Jaona se tient debout.

 

Longtemps après que son corps desséché,

amoureusement bercé de terre brune sous les dunes du sud

aura été pleuré, célébré,

retourné peut-être dans l’éclat rouge d’un linceul

il se dressera

comme les totems sculptés sur les tombeaux pierreux,

dans les cœurs généreux qu’engendrent les siècles,

gonflés d’idéal fou.

Monja Jaona se tiendra debout.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 9 octobre 2020

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30 septembre 2020 3 30 /09 /septembre /2020 10:10

 

C’est un petit jardin au milieu de la ville.

Sur le râteau s’appuie un président déchu

humant dans l’air d’octobre une saison d’exil

dans le parfum fané d’un érable fourchu.

 

Bratislava s’endort dans l’odeur des cuisines.

Ana va mettre au four un grand plat de gnocchis.

Alexandre a brûlé les branches d’aubépine

et les feuilles jaunies de l’aulne et du kaki.

 

Mais son nez se retrousse et son esprit grimace.

Quand il ferme les yeux il voit le corps flamber

d’un étudiant martyr en place Wenceslas

au cœur de Prague où les espoirs sont retombés.

 

Il voudrait retrouver les senteurs de l’enfance,

la jonquille au printemps en lisière des bois

ou le fumet du choux parfumé de lard rance,

le bouquet du bouillon où cuisait la lamproie

 

ou l’effluve du vent de la steppe kirghize

comme un muezzin de feu sur les toits de Frounzé

ou le parfum d’un cierge à l’ombre d’une église

à Gorki où les siens un jour s’étaient posés.

 

Mais c’est l’odeur de sang, de poudre et de sueur

qui lui revient avec les images d’hier,

du temps où les nazis répandaient la terreur

dans son pays slovaque éprouvé par la guerre.

 

Et pourtant il sourit, caressé de mémoire

par l’odeur de savon et de parfum discret

d’Ana qui l’a soigné, lui a donné à boire,

l’a caché dans son lit, l’a aimé en secret.

 

Après la guerre vint le temps de la victoire,

l’école du Parti dans le froid de Moscou,

l’exaltation de ceux qui font enfin l’Histoire

et les conservateurs honnis que l’on secoue.

 

Quel bouquet de printemps sur les places de Prague

quand Dubček défendait le socialisme humain !

Mais Brejnev répondit par les tanks et la schlague.

Sous un talon brutal geignaient les lendemains.

 

Le peuple résistait, sans violence, sans armes,

assaillant l’ennemi des pires quolibets

et dans la chaleur d’août en ravalant leurs larmes

les Tchèques refusaient d’être un peuple laquais.

 

Mais sous le vent d’hiver au milieu de la place

Jan Palach en janvier, suivi de Jan Zajic

et plus tard en avril, à la fonte des glaces,

Evžen Plocek aussi, s’immolèrent, tragiques.

 

Et c’est cette fumée, cet âcre sacrifice,

que l’humble forestier croit sentir à nouveau,

cette chair consumée de ceux qui furent fils

d’une révolution digne où l’humain prévaut.

 

Il essaie d’effacer l’empyreume sordide

en songeant aux forêts où son métier l’entraîne,

aux parfums des sous-bois, aux champignons sapides,

aux rustiques saveurs des glands, des noix, des faînes.

 

Il ne peut pas savoir qu’un jour, lointain encore,

on le rappellera au balcon du Château.

Ana, la bien-aimée qui partage son sort,

prépare les gnocchis dans l’ombre du fourneau.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 29 septembre 2020

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26 septembre 2020 6 26 /09 /septembre /2020 16:02

Ruines l’hiver

 

C’était près de Meknès, à Volubilis.

Le grand ciel se taisait sous la brise fraîche.

L’herbe jaunissait sous les fontaines sèches.

Les noms gravés mouraient sur les édifices.

 

La mosaïque effaçait l’œil de Téthys.

Une cigogne nichait dans une brèche,

fuyant sans doute l’air gris de Marrakech

sans se soucier du couteau des aruspices.

 

Devant le lupanar au luisant phallus

Abdou le guide nous parlait de Vénus,

pince-sans-rire sous son chapeau de paille.

 

On dirait un berger menant son troupeau

de touristes essoufflés, rouges de peau,

de ruine en ruine avant que le jour s’en aille.

 

Pierre Thiollière, Garrigues, 26 septembre 2020

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